💧 Goutte à goutte
Quel est le point commun entre General Motors, Ford et Peugeot ? Ils expérimentent brutalement ce qu’est le concept de risque physique en matière de changement climatique…
Le risque physique, c’est l’impact sur l’entreprise des conséquences physiques du changement climatique. Ici, dans notre cas d’école : la sécheresse.
Les 3 entreprises automobiles ont mis leurs usines à l’arrêt car elles ne sont plus approvisionnées en semi-conducteurs. La pénurie provient initialement d’un surplus de commandes d’autres secteurs, mais risque de se prolonger jusqu’en 2023… faute d’eau !
Le process de fabrication consomme énormément d’eau, notamment pour nettoyer les puces : 156 000 tonnes d’eau, soit 60 piscines olympiques par JOUR pour le fabricant majeur TSMC.
Sauf que pour la première fois depuis 56 ans, Taïwan n’a pas eu de typhon et les précipitations sont inférieures de 40% à la moyenne.
Le mode panique est clairement activé :
les camions citernes se succèdent pour acheminer de l’eau
des avions relâchent des produits chimiques pour “faire pleuvoir”
une usine de désalinisation vient d’être créée
des restrictions sont imposées à plus d’un million d’habitants… qui n’y sont évidemment pour rien…
Une sommet de crise s’est tenu la semaine dernière avec le fabricant et les PDG des entreprises les plus exposées (Dell, Google, Intel, General Motors…).
Signe de l’importance stratégique du sujet, Joe Biden s’est invité à la réunion pour mettre la pression au producteur taïwanais. Biden prépare d’ailleurs un plan de 50 milliards pour retrouver de l’indépendance sur cet enjeu clé.
Un fait de plus qui questionne la résilience de nos économies et l’impréparation des entreprises au changement climatique en cours.
✈ “D’un autre siècle”
Il n’est pas ravissant ce petit vallon pyrénéen ? Il parait même qu’il abrite des cerfs, des isards, des lagopèdes et même deux mâles et deux femelles de grand tétras. Le vallon est une zone humide qui abrite une diversité animale et végétale précieuse et fragile.
Et bien, voilà ce qu’il pourrait devenir…
Le média Reporterre nous alerte sur ce projet aussi délirant qu’anachronique : la chambre de commerce d’Andorre vient de rendre public un projet d’aéroport à 2 000 mètres d’altitude au cœur des Pyrénées. Au programme, une piste d’atterrissage pouvant accueillir des Boeing 737 et quelques boutiques de luxe.
L’objectif est très clair : accueillir 500 000 (très très riches) passagers chaque année en provenance de Russie, d’Asie et du Golfe Persique.
Les conséquences pour le climat et la biodiversité sont évidemment très lourdes. Le député de l’Ariège, Michel Larive résume parfaitement la situation :
« Un projet aberrant, daté d’un autre siècle ».
Heureusement, la résistance locale s’organise pour faire barrage à cette folie.
Le foutage de gueule ne serait pas tout à fait complet sans le très classique “on va planter des arbres pour compenser…”. C’est précisément ce que les porteurs de projet mettent en avant pour convaincre les différentes parties prenantes. #BullshitPuissance1000
💥 Boum !
On ne va pas bouder notre satisfaction. Le sommet de la semaine dernière, à l’initiative de Joe Biden, ressemble à une putain de bonne nouvelle pour le climat (pardon pour la vulgarité, mais ça fait plaisir).
Déjà, les pays présents au sommet représentaient 80% des émissions mondiales. Les bonnes personnes étaient donc autour de la table.
Vu de France, celui que Trump appelait Sleepy Joe est en train de réaliser ses 100 premiers jours au sprint. Le retour des Etats-Unis dans l’Accord de Paris est fracassant:
Objectif de -50% d’émissions d’ici à 2030 (c’est dans 9 ans, c’est demain). C’est tout simplement X2 par rapport à l’objectif précédent.
Objectif de neutralité carbone pour les Etats-Unis en 2050.
Et dans le sillage des Etats-Unis, d’autres pays ont annoncé des objectifs plus ambitieux les uns que les autres. Une véritable émulation pour prendre le leadership mondial sur cette question du climat.
Cette émulation sur les objectifs doit désormais se traduire en émulation sur les actions.
Hyper envie d’y croire !
🎉 Le vrac des Good News
Carrefour et Système U annoncent la fin du ticket de caisse papier systématique. Ils rejoignent des précurseurs comme Décathlon qui propose l’alternative par mail depuis 2018.
Interdiction de la pêche électrique en Europe. La décision vient de la Cour Européenne de justice qui bannit la pratique. Le principe : envoyer d’un chalut des impulsions électriques dans les sédiments marins pour y déloger les animaux et mieux les capturer dans le filet qui suit…
Le Chiffre : elle a bon dos la planète…
Une voiture sur cinq achetée en France... est fabriquée en France.
C'était une sur deux en 2000.
20 ans de délocalisations générées davantage par le dumping social que par la transition écologique...
Et pourtant, les mêmes qui n'ont rien fait pour lutter contre cette désindustrialisation (en faisant confiance au marché et aux traités de libre-échange) brandissent aujourd'hui le chantage à l'emploi pour faire barrage aux mesures de transition écologique...
Par ailleurs, aucune des nouvelles voitures électriques qui arrivent sur le marché ne sont produites en France : Peugeot e-208 et e-2008, la Dacia Spring et la Renault Twingo.
La moins mauvaise manière de limiter les impacts sur l'emploi, c'est de planifier et d'accompagner la transition sur la durée. C'est précisément l'un des objectifs de la transition écologique.
Plus de chiffres chaque semaine sur le compte Insta de “Pas de Côté”.
🌳 Les faiseurs : “L’homme qui a arrêté le désert”
Je vais vous raconter l’histoire de Yacouba Sawadogo, ce paysan du Burkina Faso qui a donné sa vie à faire revivre les terres.
Nous sommes il y a 40 ans, au Burkina Faso. Deux vagues de sécheresse plongent la région dans la famine. Les plus riches quittent les terres devenues des déserts pour chercher un avenir meilleur ailleurs.
C’est là que le combat de Yacouba Sawadogo prend sa source.
« J’ai su que le jour était arrivé. Il fallait que je travaille la terre, celle qui nourrit et qui soigne. C’était elle qui pouvait nous sauver ».
Le paysan est un autodidacte. Il cherche des solutions en observant la nature et en s’intéressant aux pratiques de ses ancêtres :
« Pour moi, c’était une évidence, il fallait utiliser les techniques traditionnelles pour rendre au sol sa fertilité et éliminer la famine ».
La technique consiste à creuser des cuvettes et à les remplir de fumier. Dès qu’il pleut, l’eau ne ruisselle plus. Elle se retrouve durablement emmagasinée dans cette couche de fumier sous la terre. C’est la technique du zaï.
Des arbres sont aussi plantés pour “fixer le sol”. Des petits murs de pierres sont savamment disposés pour mieux retenir l’eau. Une combinaison de techniques indispensable pour s’adapter à des conditions extrêmement rudes.
Le démarrage est difficile : avant d’être surnommé “l’homme qui a arrêté le désert”, Yacouba Sawadogo a été appelé “l’idiot du village”. Il ne se décourage pas :
« C’est dans le travail et la ténacité que l’on récolte les fruits de ses efforts »
Quelques années plus tard les résultats sont spectaculaires : Yacouba Sawadogo a réussi à faire naître une forêt nourricière de 40 hectares où poussent baobabs, papayers, pruniers et acacias. Il a depuis formé plus de 400 paysans à ses techniques.
Son aura dépasse désormais son pays. En 2018, le cultivateur burkinabais a reçu le Right Livelihood Award, une sorte de prix Nobel alternatif. Il vient d’être reconnu “champion de la terre 2020” par les Nations-Unies.
L’héritage inestimable qu’il laisse aux générations futures est probablement sa plus belle récompense :
« Mon projet est pour les générations futures. Je ne veux pas manger aujourd’hui et laisser mes prochains sans nourriture demain. Je travaille pour semer les graines de la richesse »
Son portrait complet est à retrouver dans “Le Monde”.
💰 Greenwashing : le nerf de la guerre
Alors que l’Etat français vient d’être condamné pour inaction climatique…
Alors que les banques françaises sont épinglées régulièrement pour leur soutien massif aux énergies fossiles…
Alors que la France vient d’accoucher d’une demi loi climat, dont l’objectif avant détricotage était déjà inférieur à l’objectif européen… (-40% d’émissions d’ici 2030 contre -55% pour l’Europe).
Et bien voici une magnifique vidéo d’autopromotion qui dit que tout est déjà lancé et que tout va bien se passer. Il suffirait de continuer et d’accélérer !
Pardon, mais on a le droit d’en douter…
Notre Président a d’ailleurs emprunté la formule de Maud Caillaud, fondatrice de Green-Got (“Le nerf de la guerre, c’est la finance”) qu’elle a prononcé dans notre podcast de la semaine dernière.
Même constat, mais solutions radicalement différentes.
@Maud : réclame tes droits d’auteur :)
⚖ Ressource : du concret
C’est toujours compliqué de se représenter ce que sont concrètement les tonnes de CO2. L’unité ne parle clairement pas.
L’ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie) nous propose un petit outil pour convertir des tonnes de CO2 en trucs du quotidien.
Vous serez ravis d’apprendre que 2 tonnes de CO2, soit l’objectif d’émissions par personne en 2050), c’est :
272 repas avec du bœuf
3 922 repas végétariens
1 156 069 km en train
121 smartphones
ou encore 436 681 feuilles de papier A4
Un petit outil hyper simple avec lequel on peut s’amuser à convertir des tonnes de CO2 en plein d’objets ou de services du quotidien. Une manière ludique de rendre cette unité beaucoup plus concrète.
Soyons plus nombreux chaque dimanche à 11h.
N’hésitez pas à partager le “Pas de Côté” que vous venez de faire.
… ou inscrivez-vous, si vous êtes arrivé là par hasard…
Crédit photo couverture : Adam Schultz
C’était trop agréable et enrichissant à lire, merci beaucoup 💛
Très intéressant, j'apprends encore plein de choses ! Merci pour ce récap' :)