🌫️ Brouillard
Produire cette revue de presse, c’est lire beaucoup d’articles, essayer d’en faire le tri, synthétiser et y ajouter un regard personnel.
N’étant ni scientifique, ni journaliste, je le fais forcément avec ma subjectivité, ma limite de compréhension des sujets et mes propres biais.
Le contenu présent ici n’est en rien une vérité absolue. C’est un regard sur l’actu.
Pourquoi vous dire tout ça aujourd’hui ?
Tout simplement parce que courant octobre, un sujet de l’actualité est venu illustrer à merveille la difficulté d’y voir clair dans la multitude d’infos et de sources. Ce sujet est majeur car il concerne l’eau du robinet bue par des dizaines de millions de Français.
Le Monde a publié un article alarmant sur le relèvement des seuils réglementaires. Un tour de passe-passe y est dénoncé.
Ce qu’on retient de cet article : des pesticides rendent l’eau du robinet non-règlementaire pour des millions de Français. Plutôt que de s’attaquer à la cause, on relève les seuils sur la base de nouvelles données fournies par l’industriel qui produit le fameux herbicide incriminé.
Scandale d’Etat ? Lobbying menaçant la santé de la population ?
C’est là que ça se complique.
Des scientifiques ont critiqué l’article et le journaliste. Ils ont défendu le relèvement des seuils et le processus d’évaluation des agences de contrôle.
La dernière phrase du scientifique François-Marie Bréon (Physicien-climatologue, et Président de l’Association Française pour l’Information Scientifique - AFIS) m’a laissé sans voix : “Moi, je choisis de faire confiance aux évaluations de cette agence”.
Il n’y aurait donc pas de vérité mais chacun pourrait choisir la sienne.
Flippant, notamment quand il s’agit de la santé de millions de Français.
Comment se positionner ? Du côté des lanceurs d’alerte ou du côté de l’autorité scientifique qui valide ?
C’est là qu’on se rend compte de notre chance inestimable d’avoir le GIEC en matière de climat pour établir fermement le consensus...
🟨 Plus c’est gros…
Deuxième discorde entre média et scientifiques ! Cette fois-ci, vous allez voir qu’il est bien plus facile de se positionner tant la ficelle est grossière.
Reporterre, média cité régulièrement ici, a publié un article sidérant cette semaine. Le voici résumé en un tweet par le directeur du média lui-même :
Rien ne va :
l’analyse de la conso porte sur deux mois seulement (septembre / octobre)
l’axe des ordonnés ne commence pas à zéro, ce qui biaise la lecture du graph
on oublie volontairement la chaleur du mois d’octobre 2022 et son impact sur le chauffage électrique
Bref, on tord le cou à des chiffres historiques et partiels pour leur faire dire que la consommation électrique ne va pas augmenter dans le futur.
Avec ce mini histogramme bancal, on met à la poubelle les mois de travail de RTE (le gestionnaire du réseau) qui a modélisé finement notre futur énergétique.
Cette escroquerie intellectuelle a un but : fournir un argument contre le nucléaire.
Que Reporterre soit contre le nucléaire, c’est leur droit le plus strict. Qu’ils publient des arguments pour étayer leur position, c’est aussi leur droit le plus strict.
En revanche, la manipulation de données n’est ni à la hauteur du sujet, ni à la hauteur de la qualité du contenu qu’ils publient habituellement.
Quand c’est trop gros, ça ne passe plus.
🎉 Le vrac des Good News
C’est une excellente nouvelle difficile à croire.
Elle émane pourtant d’une source crédible : l’Agence Internationale de l’Energie.L’agence prévoit l’atteinte d’un pic de consommation des énergies fossiles en 2025. Dit autrement, après 2025, la consommation devrait diminuer ou a minima se stabiliser.
C’est évidemment très insuffisant pour atteindre les objectifs climatiques. Cela dit, compte-tenu de l’historique (une augmentation chaque année) et des faibles mesures d’atténuation, la perspective d’un pic dans 3 ans reste encourageante.
Autre bonne nouvelle avec un plan, des moyens et de l’ambition : le gouvernement annonce un vaste programme pour adapter la forêt au changement climatique.
Au-delà du chiffre d’un milliard d’arbres plantés d’ici 10 ans, le plan vise à renforcer la résilience des forêts face aux conséquences du dérèglement climatique (feux, hausse des températures…).
🚆 Le chiffre : c’est beau
C’est le nombre de passagers transportés cet été par la SNCF. Un chiffre en hausse de 10% par rapport à l’an dernier.
On ne se rend pas bien compte de la prouesse opérationnelle derrière ce chiffre. Nous avons de la chance d’avoir un moyen de transport sécurisé, moderne, à l’heure qui permet d’aller au travail, en week-end ou en vacances sans quasiment émettre de carbone.
What else ?
L’occasion de reparler des ordres de grandeur d’émissions de gaz à effet de serre selon le mode de déplacement. Regardons par exemple un aller simple Paris-Marseille :
Si malgré ça, on garde une envie irrésistible de critiquer la SNCF (c’est un sport national), on peut éventuellement se plaindre du prix…
Quand on voit le litre d’essence subventionné de 30 centimes, ou encore le kérosène de l’avion non taxé, la comparaison avec le train est pour le moins biaisée. C’est d’ailleurs Jean-Pierre Farandou himself, le PDG de la SNCF qui le rappelait il y a quelques mois :
“Ce n'est pas le train qui est trop cher, c'est l'avion qui ne l'est pas assez.”
🍻 Les faiseurs : cheers
En hommage à Timothée Parrique, économiste spécialiste de la décroissance et grand adepte de phrases chocs, je m’essaie à l’exercice de la punchline : “la décroissance, c’est beaucoup de croyants, peu de pratiquants”.
Entre être d’accord sur le principe théorique, et l’appliquer concrètement, il y a un monde.
C’est d’autant plus vrai lorsqu’on parle à des entrepreneurs qui ont majoritairement la croissance du chiffre d’affaires et la rentabilité comme boussole.
Brussels Beer Project passe de croyants à pratiquants.
La brasserie Belge vient d’annoncer la fin de ses exportations hors d’Europe. Le brasseur était notamment implanté en Australie, aux Etats-Unis, ou encore au Japon. Avec cette décision, Brussels Beer Project renonce à 500 000 bouteilles vendues par an, soit 10% de ses ventes.
Cette décision a été motivée par 2 enjeux environnementaux :
Réduire leur empreinte carbone (et donc le fret associé à l’exportation lointaine)
Réduire le plastique. Les exportations se faisaient en fûts en plastique à usage unique
Elle a aussi été motivée par un enjeu stratégique fort qui fait le lien entre économie et écologie : augmenter la résilience de l’entreprise face aux chocs en cours et à venir. On est plus fort en étant moins dépendant des flux internationaux qui peuvent ralentir ou s’arrêter avec une pandémie ou une crise énergétique.
Enfin, c’est aussi une question de vision et de philosophie magnifiquement résumée dans cette phrase du cofondateur :
“Ce sont des commandes importantes, surtout dans la situation économique actuelle. Mais nous ne voulons pas regarder les 24 prochains mois, mais plutôt les 24 prochaines années.”
Bravo Brussels Beer Project.
🍵 Greenwashing : “responsable”
Imaginez du “thé responsable”. Il serait cultivé localement ? Il serait produit de façon éthique ?
Détrompez-vous ! Le “thé responsable” se trouve dans une capsule jetable, vendue et livrée par Amazon.
Du déchet, de l’évasion fiscale et du fast shopping dans un même produit.
Un combo gagnant repéré par le compte Twitter Alerte Greenwashing.
🧒🏼 La ressource : kids friendly
Très chouette ressource à regarder en famille avec une conférence de l’ingénieur Greg de Temmerman à destination des enfants (à partir de 7/8 ans).
Il y est question d’énergie et de climat avec des illustrations et un ton très adaptés pour un jeune public. Cette conférence a d’ailleurs été réalisée en visio face à 200 classes d’école primaire !
Un excellent moyen d’aborder la question du climat de façon ludique avec ses enfants.
NB : les adultes vont aussi apprendre des choses ! Je suis prêt à prendre les paris. Ça a été le cas pour moi.
Merci Valérie pour ton commentaire !
Je me pose aussi des questions sur ce sujet. J'ai aussi lu une réponse de BNP qui m'a donné à réfléchir. Je vais essayer d'en parler dans la prochaine news !
Excellente journée et encore merci pour tes encouragements !
Bonjour François, j’aime l’humilité que tu exprimes et qui est ta marque de fabrique. C’est le gage de l’honnêteté intellectuelle ! Moi aussi. Je suis traversée de doute face à certains articles. Le sujet qui me taraude en ce moment et pour lequel j’ai besoin de confronter les points de vue est le procès qui est fait à l’encontre de bnp, ça et SG par l’oxfam concernant le financement des énergies fossiles. J’ai un doute sur la manière dont sont calculés les sommes investies. Surtout après avoir lu la réponse du crédit agricole. Peut être que les informations précises de financement de projet fossile ne sont pas disponibles et qu’on est réduits à l’utilisation de données plus générales qui inclut fossile et non fossiles. Même si l’oxfam est transparent sur la méthodologie je ne comprends pas le choix qui est fait. Et j’aimerais être rassurée. Quel est ton point de vue sur ce sujet ? Bon dimanche et au plaisir de te lire.
Valérie